Le 18 octobre dernier, l’Assemblée Générale de Beci désignait Marc Decorte à la présidence, pour succéder à Thierry Willemarck. Le nouveau président, par ailleurs CEO de Shell Belgique et Luxembourg, porte un regard confiant sur l’avenir de l’entreprenariat bruxellois et sur celui de sa chambre de commerce.
Si Marc Decorte est un « echte Brusseleir » (il a vécu à Anderlecht, Evere, puis Woluwe), il se définit avant tout comme un citoyen du monde : « Ma carrière m’a amené à m’expatrier douze années, à Londres puis à Budapest, et m’a fait voyager partout dans le monde. Cela a certainement élargi mon regard. Ce que j’en retiens, c’est que l’ouverture sur le monde est une richesse, tant humainement que sur le plan des affaires. On a toujours quelque chose à apprendre des autres. »
Un background d’entrepreneur
Sa carrière, Marc Decorte l’a entamée, en quelque sorte, dans l’affaire familiale : « Mes parents avaient une petite entreprise dans le secteur alimentaire, à Anderlecht ; plus tard, dans l’immobilier résidentiel, toujours sur le marché bruxellois. Cela m’a d’emblée mis au contact des réalités d’une PME. » Une fois acquis son diplôme d’ingénieur (à l’UCL, avec une spécialisation en télécoms), Marc Decorte est entré dans la vie professionnelle chez Moorkens, groupe anversois essentiellement actif dans l’importation de voitures. Deux ans plus tard, il passait au service du groupe Shell, qu’il n’a plus quitté depuis et où il a occupé diverses positions, parfois simultanément ; les unes au niveau local, d’autres au niveau européen ou global. Avec un fil conducteur : sa passion pour la technologie et pour les affaires.
Dans ses positions les plus récentes, Marc a eu la responsabilité de développer et de consolider le business retail du groupe Shell dans les pays d’Europe de l’Est, y compris la Russie. À son retour en Belgique en 2006, il prend la direction de l’équipe globale pour la gestion des cartes de carburant et de fidélisation. De 2011 jusque fin 2016, Marc crée une nouvelle équipe de transformation digitale couvrant l’ensemble des activités pour le Groupe Shell au niveau mondial.
« En parallèle, depuis un certain nombre d’années, je me suis investi dans l’accompagnement de startups qui utilisent les technologies numériques pour créer de nouveaux business models », poursuit-il. « Je fais du coaching et je leur apporte une aide stratégique dans leur approche du marché, pour les aider à s’organiser, assurer leur croissance et pouvoir la gérer, ce que je combine éventuellement avec un rôle non-exécutif dans leur conseil d’administration. »
Élargir les horizons
« L’ancrage belge est très important pour moi, ainsi que l’ancrage bruxellois », affirme Marc Decorte. « Mais cela ne signifie en aucun cas le repli sur soi. J’ai vu une variété de villes et d’économies dans ma carrière. Bruxelles a ses propres atouts. Dans le passé, nous avons réussi à attirer chez nous les institutions européennes et l’OTAN ; on peut en être fiers. Mais pour exprimer son vrai potentiel, Bruxelles doit se réinventer continuellement et rayonner au-delà de ses frontières. C’est là que sont les opportunités de croissance.»
Des exemples de bonnes pratiques ? « Il suffit d’observer. On pourrait évoquer un certain manque d’assertivité des Belges, par exemple. À l’étranger, nous sommes souvent perçus comme des gens pragmatiques, capables d’atteindre des compromis, ce qui est une grande qualité, mais peut-être sommes-nous trop modestes. On n’aime pas trop se vendre, au contraire des Américains ou des Néerlandais, qui intègrent l’éloquence et la capacité de se vendre très tôt dans le cycle d’éducation. C’est dans leur ADN ; nous devrions l’intégrer dans le nôtre aussi. »
Grandes et petites entreprises en symbiose
De Beci, dont il assume désormais la présidence pour les trois prochaines années, Marc Decorte dit avoir appris à vraiment la connaître depuis son retour en Belgique : « J’étais souvent en déplacement à l’étranger mais, quand j’étais à Bruxelles, je fréquentais les événements de Beci qui me donnaient l’impression d’une belle machine, bien huilée. C’étaient – ce sont toujours – des moments privilégiés pour rencontrer, en même temps et dans le même lieu, les capitaines d’entreprises de Bruxelles. Non seulement les chefs de grandes entreprises, mais aussi un mix intéressant d’entreprises beaucoup plus petites. »
C’est ce qu’il appelle « l’écosystème business » : « Je suis persuadé que nous évoluerons de plus en plus dans un tel écosystème, où les entreprises de toutes tailles ont un rôle à jouer. On le voit très bien dans le domaine de l’innovation, où elles ont de plus en plus besoin de collaborer. La génération de nouvelle valeur résidera de plus en plus dans les partenariats et dans des écosystèmes, parce que les défis à relever sont toujours plus complexes. »
Voilà, aux yeux de son nouveau président, un rôle pour Beci. Et c’est aussi le sens du projet The Cham, auquel Marc Decorte souscrit pleinement : « Comment créer l’environnement où la startup travaillerait en symbiose avec la grande boîte ? Bref, comment faciliter la création d’écosystèmes ? Dans mon parcours, j’ai eu la chance de pouvoir réaliser des écosystèmes d’entreprises qui fonctionnent. J’y crois fermement et The Cham s’inscrit exactement dans cette perspective : c’est une évolution dans la continuité des services de la Chambre de Commerce. Quant à moi, j’y apporte mon expérience pour rendre l’initiative plus solide et plus porteuse. C’est d’ailleurs l’une des motivations qui m’ont poussé à accepter ce rôle de président, parce que la Chambre a initié un projet stratégique dans une direction que je soutiens à 100 % et qui correspond à mes propres centres d’intérêt. »
Numérisation : un énorme potentiel
La numérisation des services de la Chambre est un autre chantier qui interpelle plus particulièrement l’ingénieur Marc Decorte. « Je suis impatient de partager avec Beci mon expérience en numérisation acquise au niveau mondial mais aussi au niveau de la startup. Je pense que la numérisation donne à toutes les organisations, y compris les chambres de commerce, tout un nouvel horizon à découvrir. Je suis sûr que nos membres se trouvent devant les mêmes défis, mais aussi opportunités ; c’est l’occasion pour nous de les accompagner tout en ayant parcouru nous-mêmes ce chemin. Mon expérience m’a appris à oser faire les premiers pas ; puis on ‘apprend en marchant’. Nous ne voyons probablement qu’une infime partie des opportunités de la numérisation ; nous allons les découvrir au fur et à mesure du parcours. Mais je dirais que le plus important, c’est une question d’attitude : est-ce que nous abordons la digitalisation comme une opportunité ou une menace ? Je crois que, si on la prend comme une menace, elle le devient ; de même pour l’opportunité. Soyons également entrepreneurs avec le numérique»
Quant à l’avenir de « sa » Chambre, Marc Decorte se montre confiant :
La Chambre de Commerce de Bruxelles existe depuis plus de trois siècles ; cela veut dire qu’elle a déjà connu plusieurs révolutions sociétales et entrepreneuriales. Elle a donc sa raison d’être. D’une part, c’est la relation entre les entreprises et les entrepreneurs ; une relation de confiance où la Chambre joue un rôle primordial.
D’autre part, c’est aider ses membres à comprendre les changements dans l’environnement des affaires et à s’adapter afin que les entrepreneurs puissent se concentrer sur leur ‘core business’.
Et finalement, c’est jeter un pont vers le monde politique pour aider celui-ci à comprendre et à créer les conditions favorables au business, donc à l’emploi, à la création de valeur et au bien-être de la société dans son ensemble. C’est un cercle vertueux qui profite à tous et auquel nous apportons notre contribution.
Et de conclure : « La raison d’être de la Chambre de Commerce va rester la même, mais les services spécifiques rendus aux entreprises, et la façon de les rendre, vont évoluer. Comme toujours depuis 300 ans. »
« L’ancrage belge et bruxellois est très important pour moi, mais cela ne signifie en aucun cas le repli sur soi. Pour exprimer son vrai potentiel, Bruxelles doit se réinventer continuellement et rayonner au-delà de ses frontières. »
« Est-ce que nous abordons la digitalisation comme une opportunité ou une menace ? Je crois que, si on la prend comme une menace, elle le devient ; de même pour l’opportunité. »
« Je suis persuadé que nous évoluerons de plus en plus dans un écosystème, où les entreprises de toutes tailles ont un rôle à jouer. »