Lorsque l'un de vos travailleurs ou travailleuse tombe
malade, il est essentiel de connaître les droits et obligations de chacun·e
pour éviter les malentendus et garantir une gestion conforme à la législation.
En tant qu'employeur·euse, plusieurs questions peuvent se poser sur les
démarches à suivre, les délais à respecter, ou encore les actions que vous
pouvez entreprendre pour vérifier la validité d'un arrêt maladie.
Dans cet article, nous répondons aux 12 questions les plus fréquentes que se posent les employeur·euses lorsqu’un·e employ·ée annonce une incapacité de travail. De la communication de l'arrêt maladie au certificat médical, en passant par les obligations du travailleur ou de la travailleuse pendant son absence ou en cas de maladie pendant les congés, nous vous offrons un éclairage clair et pratique sur ces points cruciaux.
1. Dans quel délai mon travailleur/ma travailleuse doit-il me prévenir qu'il est malade ?
Le travailleur/la travailleuse doit informer son employeur·euse de son incapacité de travail « immédiatement », c’est-à-dire dès qu'il en a connaissance, sans délai, sauf en cas de force majeure. Par exemple, si son incapacité survient le vendredi soir, il doit en avertir son employeur·euse le même jour, même si l'absence ne concerne que le lundi suivant. Retarder cette notification jusqu'au lundi matin constitue une faute. Ceci a une certaine importance, dans la mesure où la période de salaire garanti débute dès le premier jour d’incapacité, même si ce jour ne coïncide pas avec un jour de travail effectif.
2. Si mon travailleur/ma travailleuse doit subir une hospitalisation prévisible, peut-il/elle attendre le jour de l'hospitalisation pour me prévenir de son absence ?
A notre estime, le·la travailleur·euse ne peut pas attendre le jour de son hospitalisation pour informer son employeur·euse. Bien que la loi ne précise pas explicitement ce cas, il est attendu du travailleur·euse qu'il/elle informe suffisamment tôt l'employeur·euse en cas d'intervention prévisible et non urgente, afin de lui permettre de s'organiser. Ne pas le faire pourrait constituer un manquement contractuel, dans la mesure où le travailleur ou la travailleuse doit exécuter le contrat de bonne foi.
3. Mon travailleur/ma travailleuse doit-il·elle m’informer de son absence par téléphone, par e-mail, ou par n’importe quel moyen ? Puis-je imposer un mode de communication ?
La loi ne précisant rien à ce sujet, il est en règle admis que le travailleur ou la travailleuse peut utiliser n'importe quel moyen pour informer son employeur·euse de son absence, que ce soit par téléphone, SMS, e-mail ou autre, sachant que le mode de communication choisi doit permettre à l'employeur·euse de recevoir rapidement l'information et de comprendre qu'il s'agit d'une incapacité de travail.
L'employeur ou l’employeuse peut toutefois préciser dans le règlement de travail les moyens de communication à utiliser pour garantir une bonne réception (par exemple : e-mail ou téléphone exclusivement, à l’exclusion de Whatsapp ou de Teams), à défaut de quoi l'avertissement pourrait être considéré comme non reçu.
4. Est-ce que je peux exiger un certificat médical dès le premier jour d'absence ?
En principe, un employeur·euse peut exiger la production d’un certificat médical de son travailleur ou de sa travailleuse dès le premier jour d'absence, si cela est prévu dans le règlement de travail (ou dans une CCT). Si rien n’est prévu dans le règlement de travail (ou dans une CCT), l'employeur·euse peut demander un certificat, mais doit pouvoir prouver cette demande. Le délai fixé par la loi pour la transmission du certificat est de 2 jours ouvrables, à compter du jour de l’incapacité.
Depuis fin 2022, la loi permet toutefois à l’employé·e de ne pas fournir de certificat pour le premier jour d’incapacité à concurrence de trois fois par an. Dans les entreprises occupant moins de 50 travailleur·euses, il est néanmoins possible de déroger à cette règle, et de maintenir l’obligation de production d’un certificat médical dès le premier jour d’incapacité, à condition de le prévoir expressément dans le règlement de travail.
Aussi, en cas d’incapacité pendant les vacances annuelles, depuis janvier 2024, le ou la travailleur·euse doit immédiatement informer son employeur·euse de son lieu de résidence s’il ou elle ne se trouve pas à son domicile et fournir un certificat médical, précisant l’incapacité et sa durée probable, même sans demande expresse de l’employeur.
5. Quelles mentions doit contenir le certificat médical pour être valide ? Que faire si le certificat est incomplet ?
Le certificat médical doit contenir trois mentions obligatoires :
(1) l'incapacité de travail,
(2) la durée probable de l'incapacité, et
(3) la possibilité pour le travailleur ou la travailleuse de rendre à un autre endroit en vue d’un contrôle médical.
Une convention collective, un règlement de travail ou un contrat de travail peuvent à notre estime exiger des informations supplémentaires, telles que l’identité du travailleur, la date de début de l’incapacité, et si elle est nouvelle ou s’il s’agit d’une rechute.
6. Mon travailleur/ma travailleuse doit-il·elle m’expliquer la raison précise de sa maladie ou seulement m’informer de son incapacité de travailler ?
En principe, le·la travailleur·euse n'est pas obligé·e de fournir des détails sur la nature exacte de sa maladie. Il ou elle doit simplement informer l'employeur·euse de son incapacité de travailler et fournir un certificat médical (lorsque ceci est requis). Le secret médical protège la nature de l'affection. Cependant, l'employeur·euse peut demander des informations sur les circonstances de l'incapacité (par exemple, si elle résulte d'un accident ou d'une rechute) pour exercer certains droits ou obligations, notamment en matière d'assurances ou de responsabilité.
7. Ai-je le droit de contacter mon travailleur ou ma travailleuse pendant son arrêt maladie ?
Oui, vous pouvez contacter votre travailleur·euse pendant son arrêt maladie pour des raisons professionnelles, mais cela doit être fait avec prudence. Il n'est pas interdit de le/la contacter, mais la prise de contact doit respecter son état de santé et ne pas constituer une pression pour reprendre le travail ou fournir des tâches incompatibles avec son incapacité, au risque d’être interprétée comme du harcèlement. La manière dont vous le contactez dépend de votre relation avec lui et de la nature de sa maladie, si elle est connue.
8. Comment puis-je vérifier si l'arrêt maladie de mon travailleur ou ma travailleuse est bien justifié ?
Pour vérifier si l'arrêt maladie de votre travailleur·euse est bien justifié, vous pouvez demander un contrôle médical. Vous avez le droit de faire vérifier l'incapacité de travail par un médecin-contrôleur, même si l’employé·e n’est pas obligé·e de fournir un certificat médical parce qu’il s’agit par exemple du premier jour d’incapacité.
Le travailleur ou la travailleuse, de son côté, doit coopérer en recevant le·la médecin envoyé·e par l’employeur·euse et en se laissant examiner par lui, si celui-ci vient à son domicile. Il ou elle doit donc communiquer à son employeur·euse l’adresse où effectuer le contrôle, et l’avertir en cas de changement. Si le travailleur·euse est capable de se déplacer, il peut également lui être demandé de se rendre au cabinet médical du médecin-contrôleur.
Si un travailleur·euse manque le rendez-vous fixé avec le médecin de contrôle sans motif légitime, il ou elle peut perdre son droit au salaire garanti pour toute la période de son incapacité de travail. L'employeur·euse peut appliquer cette sanction dès lors que l’employé·e ne facilite pas le contrôle, par exemple en ne se présentant pas ou en refusant de recevoir le médecin. Cependant, si le ou la travailleur·euse prouve qu'il était dans l'impossibilité de se soumettre au contrôle en raison d'un cas de force majeure, la sanction ne trouvera pas à s'appliquer.
9. Mon travailleur ou ma travailleuse doit-il·elle rester à son domicile pendant les heures de travail s'il est en arrêt maladie ?
Le travailleur ou la travailleuse ne doit pas rester à son domicile pendant les heures de travail, si le certificat précise que les sorties lui sont autorisées. Toutefois, le règlement de travail (ou une CCT) peut exiger que le travailleur reste à son domicile pendant une période de maximum 4 heures consécutives entre 7h et 20h pour une visite du médecin-contrôleur.
10. Mon travailleur ou ma travailleuse peut-il·elle suivre une formation, partir en voyage ou exercer une autre activité pendant son arrêt maladie ?
Un travailleur ou une travailleuse en arrêt maladie est, en principe, interdit d'exercer toute activité, qu'elle soit rémunérée ou non, car il·elle est supposé·e incapable de travailler et reçoit un salaire garanti. Cependant, cette interdiction doit être nuancée si l'activité réalisée n'est pas liée à son incapacité spécifique ou si elle ne retarde pas sa guérison. La pratique d'activités telles que suivre une formation ou partir en voyage pourrait être acceptable si cela n'entrave pas la guérison et n'est pas en contradiction avec la nature de l'incapacité.
Toutefois, certaines activités peuvent constituer une faute grave, comme
celles qui impliquent une activité concurrente à celle du travail salarié ou
qui semblent manifestement contredire l'incapacité déclarée. La prudence est de
mise, car les juridictions du travail se montrent de plus en plus réticentes à
reconnaître que l’exercice d’une autre activité durant une période d’incapacité
de travail constitue une faute grave.
11. Que se passe-t-il si mon travailleur ou ma travailleuse tombe malade pendant ses vacances ? Quels sont ses droits et obligations ?
Depuis le 1er janvier 2024, si un·e travailleur·euse tombe malade pendant ses vacances annuelles, plusieurs règles s'appliquent :
(1) Le ou la travailleur·euse doit informer immédiatement son employeur·euse de son incapacité, en indiquant son adresse de résidence si elle diffère de son domicile habituel, et fournir d’office un certificat médical dans le délai habituel, même pour un seul jour d’incapacité.
(2) Les jours de vacances pendant lesquels le ou la travailleur·euse est malade peuvent être reportés et pris ultérieurement. L’employé·e doit toutefois en faire la demande à son employeur·euse.
(3) Le ou la travailleur·euse a droit à la rémunération garantie pour les jours d’incapacité pendant ses vacances.
12. Que faire si mon travailleur ou ma travailleuse veut revenir au travail avant la fin de son arrêt maladie parce qu'il se sent mieux ?
Le travailleur ou la travailleuse peut revenir au travail, et l’employeur·euse ne peut s’opposer à sa reprise avant la fin de la période couverte par le certificat médical. L’employeur·euse ne peut pas exiger de « certificat de capacité » supplémentaire. Il est toutefois prudent de demander au travailleur ou à la travailleuse de confirmer par écrit qu’il ou elle reprend le travail de son propre chef.
Par exception, l’employeur·euse peut refuser la reprise si cela constitue un danger réel manifeste pour le ou la travailleur·euse ou pour ses collègues.
Antoine Castadot (Avocat associé, YELAW) et Louise Gillain (Avocate, YELAW)