Le deal pour l’emploi a entre-temps été coulé en texte de loi, ce qui conduit les responsables des ressources humaines à faire face à de nombreux défis. Outre certaines mesures en matière de flexibilité, le deal pour l’emploi mise également sur l’activation des employés licenciés. Le souhait du gouvernement est en effet de porter le taux d’activation à 80 %. L’une de ces mesures concerne le trajet de transition en cas de licenciement. Cette mesure est entrée en vigueur le 20 novembre 2022. Nous nous sommes entretenus à ce sujet avec Olivier Wouters, avocat associé chez Claeys & Engels.
En quoi consiste ce trajet de transition ?
Olivier Wouters : « Par cette mesure, un travailleur dont le contrat de travail est résilié par l’employeur moyennant un préavis à prester, se verra offrir la possibilité de travailler pour un autre employeur-utilisateur dès la période de préavis. Cela se fera par l’intermédiaire d’une entreprise de travail intérimaire ou d’un service public régional de l’emploi, comme Actiris, le Forem ou le VDAB. Ce trajet de transition doit être considéré comme une exception à l’interdiction légale de mise à disposition du personnel. Une telle piste pourrait s’avérer intéressante, par exemple, pour un licenciement moyennant un long préavis à prester lorsque l’employeur initial, pour des raisons économiques, n’est plus en mesure de proposer beaucoup de travail au travailleur. De son côté, le travailleur pourrait ainsi déjà tester activement un nouvel employeur. »
S’agit-il d’une obligation pour l’employeur ?
Olivier Wouters : « Non, l’employeur n’est pas obligé de proposer le trajet de transition, et le travailleur n’est pas non plus tenu d’accepter une telle offre. »
Quelles sont les formalités à respecter ?
Olivier Wouters : « Les conditions et la durée du trajet de transition doivent faire l’objet d’un accord écrit préalable entre l’employeur, le travailleur, l’employeur-utilisateur et l’agence de travail intérimaire ou le service public régional de l’emploi. La durée maximale du trajet de transition est égale au délai de préavis à prester et sa durée minimale doit encore être fixée par arrêté royal. »
Quelles conditions régissent le trajet de transition ?
Olivier Wouters : « Pendant le trajet de transition, le travailleur perçoit soit la rémunération en cours pour la fonction occupée chez son employeur, soit la rémunération qui est d’application chez l’employeur-utilisateur pour la fonction y exercée. Le travailleur a droit au montant le plus élevé des deux. Cette rémunération est versée par l’employeur, à charge pour l’employeur-utilisateur d’en rembourser une partie à l’employeur. La loi reste toutefois muette quant à la partie de la rémunération que l’utilisateur doit rembourser à l’employeur. Ceci devra faire l’objet d’un accord entre les deux employeurs. Par ailleurs, l’employeur-utilisateur est responsable du respect de la législation relative au bien-être au travail. »
Les parties peuvent-elles mettre fin au trajet de transition ?
Olivier Wouters : « Oui, tant l’employeur-utilisateur que le travailleur ont la possibilité de mettre anticipativement fin au trajet de transition moyennant une notification écrite et le respect d’un délai de préavis calculé conformément aux règles normales de licenciement, à ceci près qu’il ne faut tenir compte que de l’ancienneté accumulée par le travailleur pendant le trajet de transition. Si le travailleur notifie un contre-préavis, il sera dans ce cas, et par dérogation aux règles normales de licenciement, mis immédiatement fin au trajet de transition ».
Qu’advient-il à l’issue du trajet de transition ?
Olivier Wouters : « Si le trajet de transition est mené à son terme, l’utilisateur doit embaucher le travailleur moyennant la conclusion d’un contrat de travail à durée indéterminée. A défaut, l’utilisateur devra lui verser une indemnité égale à la rémunération correspondant à la moitié du délai du trajet de transition. Le travailleur conserve auprès de l’utilisateur l’ancienneté qu’il avait acquise pendant le trajet de transition pour le calcul du délai de préavis dans l’hypothèse où il serait ensuite licencié. Il peut en outre conserver auprès du nouvel employeur l’ancienneté acquise auprès de son précédent employeur pour l’application des dispositions relatives au crédit-temps, à l’interruption de carrière et aux congés thématiques. »
Interview de
Olivier Wouters, Avocat – Associé, CLAEYS & ENGELS Avocats