Lors de son événement « Brussels Meets Brussels », BECI a mis l’accent, une fois de plus, sur la mobilité comme enjeu majeur pour Bruxelles. Dans ce cadre, j’aimerais rebondir sur une des (bonnes) idées de l’Appel des XI organisé par l’Echo au début de l’année : « faire de la Belgique (mais surtout de Bruxelles) la championne de la voiture autonome. »
Je vais commencer par un exemple idiot : récemment, partant de notre siège place Louise, je devais me rendre avec deux collègues chez un partenaire, boulevard du Souverain. Pour ce faire, nous avons bien entendu pris… nos trois voitures de société. Vous allez nous traiter d’idiots. La réalité, c’est que ceci était la seule solution logique. En effet, nous aurions parfaitement pu nous rendre du point A au point B dans une seule voiture. Le hic, c’est qu’à l’issue de la réunion, chacun d’entre nous rentrait chez lui, dans trois directions différentes. Exemple idiot ? Pas du tout ! Car il illustre parfaitement la réalité de nombreux habitants et travailleurs de Bruxelles : la mobilité ne se résume pas uniquement à se rendre d’un point A à un point B le matin pour revenir au point A en fin de journée.
Il est dommage que, dans les différentes campagnes électorales de ces dernières années, la technologie n’ait joué aucun rôle majeur. Car, comme dit l’adage, ‘technology will save us’, et les politiques d’ici et d’ailleurs tardent à s’y mettre.
Les utilisateurs d’Uber (toute considération socio-lobbyiste mise à part) et de Waze attesteront que ces deux « apps » révolutionnent le concept de mobilité. Mais ce n’est pas assez. On peut se torturer les méninges dans tous les sens pour résoudre le problème de mobilité en 2020, c’est inutile. Pour résoudre le problème de mobilité, il faut se projeter suffisamment loin dans l’avenir, pour ensuite mieux revenir vers le présent. Faire un rétro-planning, quoi. Comme dans une entreprise.
Nous sommes en 2040. Selon toutes les prévisions, la voiture autonome est une réalité. Qu’elle tourne à l’essence, à l’électricité, à l’hydrogène ou au chocolat Jacques, mettons ça de côté pour l’instant, ça n’impacte pas le raisonnement.
Suite à l’avènement des voitures autonomes, le métier de chauffeur de taxi (qu’il soit Vert, Uber, ou à petit pois) a disparu. C’est dommage, mais c’est la réalité. Uber a investi massivement dans la voiture autonome, et a probablement racheté ou fusionné avec Waze (ou quels que soient leurs successeurs respectifs dans 20 ans). Toutes ces voitures autonomes sont désormais partagées, puisque quand je tapote sur Uber pour aller d’un point A à un point B, je me fiche pas mal qu’il y ait quelqu’un assis à côté de moi (du moment que c’est moins cher), étant donné qu’il y a inévitablement quelqu’un qui va (approximativement) au même endroit que moi au même moment (ou plus ou moins), et que c’est l’ « app » qui programme tout ça pour optimiser le temps de déplacement et le coût.
Nos trois caballeros mentionnés plus haut se déplaceront donc de la manière suivante : Uber autonome partagé à trois, sous Waze, pour aller du point A au point B (tous ensemble), suivi d’un Uber autonome (partagé chacun avec d’autres personnes), toujours sous Waze, pour rentrer chez soi après la réunion. Reste à déterminer le coût du trajet pour l’entreprise, celui-ci étant lié bien sûr à la fiscalité des voitures de société (si ça existe encore) et des solutions de mobilité en général.
Ça, c’est le monde dans 20 ans. Tous les constructeurs automobiles s’y préparent. Uber a déjà déclaré sa volonté d’investir massivement dans la voiture autonome « le jour où ».
Alors, pourquoi ne pas s’y préparer ? Pourquoi ne pas faire de Bruxelles une ville pionnière de la voiture autonome partagée ? De par sa taille et sa localisation, Bruxelles est le « labo » idéal pour toute nouvelle technologie ou évolution sociétale.
Force est de constater qu’aujourd’hui on n’en fait rien, de ce labo. Pourquoi ? À cause de la lasagne institutionnelle : mettre en œuvre une telle politique disruptive à Bruxelles demanderait l’aval des différents échelons de pouvoir qui « co-gèrent » ou impactent la ville (communes, régions, fédéral, etc.) Et ça, c’est pas pour demain !
Nous dépêtrer de la lasagne institutionnelle est un prérequis majeur à toute politique de mobilité cohérente pour Bruxelles. C’est ça, le grand chantier auquel les politiques devraient s’atteler dès maintenant, pour être prêts… dans 20 ans ?