Haile Abebe est le fondateur du restaurant Toukoul et de trois autres établissements mêlant culture et nourriture : le Cercle des Voyageurs, le Café Begin et le Loft 58, la cafétéria de l’Ihecs. Ingénieur de formation, il s’est reconverti pour accomplir un vieux rêve : apporter à Bruxelles l’exotisme de la cuisine de son pays d’origine, l’Éthiopie.
À quel moment de sa carrière un ingénieur décide-t-il de tout lâcher pour ouvrir son premier restaurant ?
Ça se passe au moment où on se rend compte qu’en tant qu’ingénieur, on ne fait plus que de la gestion de projet. En ce qui me concerne, je n’étais plus du tout dans la technique. J’avais toujours ce rêve de me mettre à mon compte. C’est important de comprendre que, quand on a longtemps travaillé pour quelqu’un, on se dit : « Bah tiens, tant qu’à faire ce que je fais, autant le faire pour moi-même ».
Tu es Éthiopien d’origine, c’était une volonté de faire connaître l’histoire et la culture de ton pays ?
J’ai vécu assez longtemps à Bruxelles pour comprendre que les gens ne connaissaient pas bien l’Éthiopie. J’ai souffert un peu de cela parce qu’évidemment, je viens d’un pays avec une longue histoire. Je pense à la famine et à tout ce qui s’est passé dans les années 80. J’ai eu ce besoin de faire connaître ce pays.
Tu t’es lancé en sachant qu’il y aurait cet engouement pour la cuisine éthiopienne ?
On ne fait jamais rien sans savoir. À l’époque, avec ma famille et des amis éthiopiens, on a créé la Belgo Ethiopian Association, une ASBL qui existe encore aujourd’hui. La structure nous a permis d’organiser des événements où on testait le concept. Cela marchait très bien. Tous ceux qui connaissaient la cuisine rêvaient d’avoir un restaurant éthiopien en ville.
Après ton premier restaurant, le Kokob, tu as créé un deuxième concept : le Cercle des Voyageurs.
Tout à fait ! C’était un projet encore différent : ce qui m’intéressait énormément, c’était la possibilité d’amener de la culture. Il est évident que je ne pouvais pas simplement faire de la restauration et du business. Si je voulais aussi faire passer un message, il fallait créer quelque chose d’autre. Je pense que, pour que les gens s’ouvrent à différentes cultures, il faut présenter ces cultures à travers différents médias. Que ce soit par la présentation de livres, la projection de films, des expositions, des concerts, etc. C’était un beau challenge à relever…
Tous ces projets, tu les as entrepris seul ?
Tout cela se décide en fonction de la taille et de l’envergure des projets. Entreprendre seul, c’est un idéal qui est difficilement atteignable. C’est un secteur difficile…