Si, concernant la fixation d’un loyer bruxellois, il existe une grille réglementaire, elle n’est pour l’heure qu’indicative. Pour mieux encadrer les loyers de la capitale, faudrait-il rendre son utilisation obligatoire ?
Pour
Ambroise Thomson, chargé de communication du Rassemblement bruxellois pour le droit à l’habitat (RDBH)
Mettre en application une grille dite « contraignante » plutôt que simplement indicative fait partie de nos principales revendications. Car actuellement, les propriétaires peuvent fixer le prix d’un loyer un peu comme ils l’entendent, sans qu’il y ait le moindre rapport avec la qualité ou de lien avec la réalité du marché. Nous défendons également les logements abordables, car en ce moment, il y a une pénurie à Bruxelles.
Une grille officielle permettrait des prix plus réalistes et plus en rapport avec la qualité d’un logement, de sorte à ce qu’un montant reste raisonnable. Depuis quinze ans, on constate aussi une augmentation des loyers beaucoup plus forte que l’index ou le revenu. Il y a là un décrochage évident, qu’il serait donc bon de résoudre. La crise du logement s’accentue, les logements abordables – ou accessibles, soit équivalents à un tiers d’un revenu – se réduisent : à peine 8 % des logements sont réellement abordables pour… la moitié des Bruxellois !
Puis, la grille actuelle est basée sur le marché ; or nous nous critiquons justement ce marché, car il est désormais prouvé qu’un logement de mauvaise qualité est plus cher qu’un logement moyen, ce qui est anormal. Une partie de la population est donc obligée d’accepter des locations de mauvaise qualité voire trop petites, d’une part ; et d’autre part, il y a une absence de critères de qualité (nombre de lumières, qualité des murs, espaces…), ce qui a un effet pervers, puisque cela n’aide en rien les négociations, un propriétaire ayant alors tous les pouvoirs !
On aimerait en fait qu’il existe une commission paritaire locative, soit une sorte d’administration qui puisse permettre de saines négociations entre propriétaire et locataire. Mais quoiqu’il en soit, la grille actuelle, que nous analysons, est insuffisante. Il faut aller beaucoup plus loin. Malgré des questions qui sont également politiques voire idéologiques, nous gardons espoir, car cette réflexion serait tout simplement positive pour l’ensemble du marché !
Contre
Olivier Hamal, Président du Syndicat des Propriétaires (SNPC)
Tant à Bruxelles qu’en Wallonie, les autorités ont prévu une grille indicative, car il est normal qu’on connaisse le prix d’un loyer, comme le prix du pain, de la viande ou d’une voiture. La mise en place d’une nouvelle grille objective est complexe. Prenons un boulevard bruxellois, avec deux appartements du même niveau dans un même immeuble et avec un même nombre de chambres : ceux-ci peuvent avoir un prix différent, simplement parce que l’un comporte une cuisine équipée, du marbre au sol et des portes en chêne. Raison pour laquelle il existe aujourd’hui une marge de négociation de 20 % à la hausse ou à la baisse, qui tient compte de ces éléments-là.
Selon nous, une grille contraignante ne se justifierait pas dans un marché belge équilibré, où les loyers sont même à la baisse et bon marché par rapport à d’autres pays, ce qui est rarement dit. Le souci, ce sont les revenus. Dans le privé, un loyer n’est pas fixé en fonction d’un revenu, mais par rapport au juste retour qu’un propriétaire peut espérer.
Quand vous percevez un revenu d’intégration ou d’un isolé à 890 euros, un appartement d’une chambre à 600 euros sera toujours trop cher, sans parler des charges locatives qui elles aussi coûtent – ce à quoi le bailleur ne peut rien. L’expérience montre aussi que l’encadrement des loyers conduit à un désintérêt pour le locatif privé, ce qui provoque alors une diminution de l’offre, une augmentation de la demande et, indirectement, une hausse des loyers !
Mieux vaut envoyer un message positif aux particuliers pour investir dans le privé, mais aussi et surtout inciter les preneurs à payer un loyer à temps et en heure. Car cela devient parfois un sport d’inciter un locataire à… ne pas payer, et celui-ci n’est jamais fautif ! Prétendre que si un loyer est moins cher les gens paieraient mieux, c’est un discours qui n’est pas cohérent. Dans les logements sociaux, malgré la fixation de loyers qui existe, il y a des arriérés d’une vingtaine de millions d’euros : c’est énorme !