Loin de l’image idyllique d’un parcours de golf ou de séminaires de stratégie, le quotidien du manager est plutôt fait de 1001 tâches brèves et fragmentées ou de réflexions interrompues par les urgences du quotidien. Au sein de cette tempête, vouloir se reposer sur les capacités du cerveau est loin d’être une évidence. Notre système a beau être puissant, il n’en est pas moins fragile !
Le cerveau du manager est sollicité en permanence. On lui demande de prendre des décisions, arbitrer, construire, négocier, imaginer… Malheureusement, les conditions dans lesquelles il est placé sont loin d’être optimales. Là où chaque tâche demanderait de la maturation, on lui demande de réfléchir et d’agir en même temps, tout en étant constamment interrompu. « Multitasking », le mot est devenu à la fois une devise et une injonction. Les sollicitations multiples et simultanées (collaborateur, mail, smartphone…) sont devenues la norme. Dans ce contexte, il faut apprendre à mobiliser son cerveau afin qu’il rende les services qu’on attend de lui !
Loin de nos espoirs, des chercheurs de premier plan comme Jean-Philippe Lachaux ont montré que nous ne sommes guère capables de nous concentrer beaucoup plus de 3 minutes d’affilée. Pire : notre cerveau a surtout du talent pour se laisser distraire. Il suffit d’un rire de l’autre côté de la paroi de notre bureau et notre esprit prend le chemin des écoliers.
Dans un tel contexte, il est indispensable de mieux comprendre le fonctionnement de nos neurones. L’attention est un phénomène largement étudié : c’est grâce à elle que nos ancêtres chasseurs-cueilleurs ont été capables de poursuivre une gazelle des heures durant. Pourtant, cette formidable capacité n’aurait rien été sans son corollaire : une petite alarme au fond du cerveau qui nous avertit d’un événement particulier, comme la présence d’un prédateur ou au contraire d’un allié susceptible de nous aider dans notre traque.
Cette double caractéristique de l’attention est toujours présente dans le quotidien d’un manager qui s’attelle à sa mission… tout en étant interrompu par 1001 sollicitations. Cette faculté de distraction était vitale mais périphérique pour nos ancêtres. Elle est devenue centrale et toxique aujourd’hui, car nous passons plus de temps à être distraits qu’à avancer sur nos projets !
Comment se concentrer ?
Face à cette réalité, nous devons réapprendre à nous concentrer. Abordons cette question à deux niveaux : comment éviter d’être distrait, et quel est le processus de la concentration ?
Nous savons tous intuitivement qu’il vaut mieux éviter les sujets de distraction. Par exemple, un simple pop-up nous avertissant d’un mail « occupe » le cerveau plusieurs minutes… et rend d’autant plus difficile notre concentration. Il est donc nécessaire de supprimer un maximum d’alertes sur nos ordinateurs et nos téléphones (mails, Facebook, Twitter).
Jean-Philippe Lachaux a résumé le processus de la concentration en trois étapes : perception, intention, manière d’agir. Tout d’abord, il est indispensable de diriger son attention afin de percevoir un maximum d’éléments. Imaginez prendre une décision en n’ayant entendu que la moitié de l’explication d’un collaborateur ! Ensuite, la concentration demande d’orienter l’ensemble de ses ressources dans une direction : être conscient des enjeux et avoir une intention claire est le meilleur moyen de se focaliser en vue d’un but précis. Enfin, Jean-Philippe Lachaux insiste sur le lien entre concentration et action. De même que le joueur de tennis peut rester concentré de très longues périodes quand il joue, un manager en action peut entretenir sa concentration durant de longues réunions… à condition qu’il prenne part aux échanges.
Si la charge mentale des managers est une réalité, une meilleure connaissance de son cerveau et du fonctionnement de la concentration est précieuse pour gagner en efficacité et en sérénité.