[Article invité]
Depuis la généralisation du télétravail, on remarque que de plus en plus de travailleurs continuent à télétravailler ou effectuer des prestations occasionnelles en ligne alors qu’ils sont couverts par un certificat médical.
Cette situation n’est pas sans poser question. Un travailleur peut-il effectuer des prestations de travail en ligne avant l’expiration de son certificat médical ? L’employeur peut-il/doit-il interdire à son travailleur d’effectuer toute prestation de travail ? Quels sont les risques liés à une éventuelle reprise anticipée du travail pour le travailleur et pour l’employeur ? Est-il possible de limiter ces risques ?
1. Sous certificat médical, un télétravailleur ne peut exécuter aucune prestation
Un travailleur est considéré comme étant en incapacité de travail lorsqu’il est dans l’impossibilité d’exécuter son travail en raison d’une maladie ou d’un accident. Le travailleur justifie de cette incapacité de travail en produisant un certificat médical à son employeur. L’incapacité de travail prend fin sans autre formalité à l’expiration de la période couverte par le certificat médical.
Un travailleur en incapacité de travail ne peut effectuer aucune prestation de travail pour son employeur et ce, pendant toute la durée de son incapacité.
Qu’en est-il de prestations extrêmement limitées ? À titre d’exemple et par analogie, dans le cadre du chômage temporaire COVID, l’ONEM interprète de manière très large la notion de « prestation de travail » et considère que le simple envoi d’un e-mail professionnel par un travailleur pendant sa période d’incapacité de travail constitue une prestation de travail.
Il est évidemment tentant pour un employeur de fermer les yeux sur les prestations réduites (par exemple de suivi de projets) effectuées en ligne par un travailleur en incapacité de travail. Cependant, strictement parlant, un travailleur en incapacité de travail ne devrait effectuer aucune prestation et ne devrait en tout état de cause ne pas y être incité par son employeur.
À cet effet, l’employeur pourrait rappeler cette règle générale aux travailleurs (par exemple dans le règlement de travail). Celui-ci pourrait également limiter l’accès aux logiciels internes pour les travailleurs en question afin que ceux-ci n’effectuent pas des prestations de travail non souhaitées.
2. Quelles sont les conséquences si un travailleur télétravaille pendant sa période d’incapacité ?
Si le travailleur effectue des prestations de travail pendant sa période d’incapacité après la période couverte par la rémunération garantie (30 premiers jours d’incapacité), celui-ci prend le risque de perdre son droit aux indemnités d’incapacité de travail versées par sa mutuelle.
Pour l’employeur cette situation n’est également pas sans risque. Ainsi, un employeur qui ferme les yeux sur des prestations effectuées en ligne par un travailleur en incapacité prend le risque que le travailleur en question lui réclame le paiement de sa rémunération pour les jours où celui-ci a effectué une prestation de travail. À notre sens, l’employeur qui solliciterait des prestations à un travailleur couvert par un certificat médical prendrait également le risque que le travailleur en question considère que son employeur exerce sur lui une charge psychosociale anormale.
3. Retour au travail d’un travailleur avant l’expiration de son certificat médical
Un travailleur qui s’estime apte à reprendre le (télé)travail et à effectuer des prestations de travail avant la date de fin d’incapacité prévue par son certificat médical, peut en informer son employeur et reprendre le travail. Son employeur peut s’y opposer.
L’employeur ne peut demander au travailleur de lui présenter un certificat médical justifiant de son aptitude à retourner au travail ni exiger que celui passe un examen de reprise au travail. Seuls les travailleurs affectés à un poste de sécurité sont soumis à un tel examen de reprise. Les travailleurs exercent une « fonction de sécurité » s’ils utilisent des équipements de travail, manipulent des véhicules à moteur, des grues, des appareils dangereux (…), portent une arme de service et peuvent mettre en danger la sécurité et la santé des employés de l’entreprise ou d’entreprises extérieures.
Il est à noter qu’un travailleur ne peut exiger de reprendre ses missions en télétravail si cela n’était pas convenu avant son incapacité de travail. Par contre, rien ne s’oppose à ce qu’un employeur et un travailleur conviennent d’une reprise du travail en télétravail si cela est de nature à accélérer le retour du travailleur au travail. Un avenant au contrat de travail reprenant les modalités du télétravail devra alors être conclu.
À propos des auteurs
Océane De Ridder, Junior Associate chez CMS Belgium & Gaël Chuffart, Partner chez CMS Belgium
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