Les entrepreneurs disposeraient de capacités hors du commun, reflétant une image de héros sans faille… Jusqu’aux premières difficultés, au premier dépôt de bilan, la faillite.
C’est sans doute au niveau émotionnel que l’affront est alors le plus grand, marquant à vie ceux qui le subissent, avec des conséquences potentiellement délétères pour la santé (burnout, suicide). Il s’agit de faire face au quotidien à des entrepreneurs vulnérables, au « bout du rouleau ». En facilitant l’expression de leur souffrance, le programme d’accompagnement reSTART de la BECI reconnait la manifestation d’un « mal-être patronal et entrepreneurial », en particulier dans un contexte anxiogène de crise sanitaire et a fortiori, économique.
La faillite, un évènement traumatique
Le dépôt de bilan sonne évidemment comme un évènement traumatique pour un chef d’entreprise. En effet, de par son pouvoir destructeur, le dépôt de bilan fait partie des expériences jugées parmi les plus redoutables et éprouvantes pour la femme ou l’homme derrière l’entrepreneur(e). Il figure à la première place des stresseurs professionnels en termes d’intensité émotionnelle, bien avant les problèmes de trésorerie et la baisse d’activité commerciale. La mise en liquidation suscite la culpabilité du dirigeant, coupable de ne plus pouvoir assumer ses responsabilités, de ne plus pouvoir mener à bien un projet dans lequel toute sa vie est investie, sa famille, ses biens, ses liens sociaux, sa santé. Les conséquences sur l’entourage, le regard des autres, les symptômes, la fin d’activité, etc. Suivies d’échanges difficiles avec les parties prenantes, professionnels de santé, institutionnels et autres, sont difficiles à vivre.
Si depuis plusieurs années, différents dispositifs de prévention des difficultés des entreprises sont prévus par le droit, malgré cela, la douleur de l’échec et la souffrance demeurent. Parce qu’il est très difficile de demander de l’aide dans les moments les plus difficiles de l’existence et parce que celui qui y est confronté, le vit comme une « blessure personnelle, narcissique, intime ».
Au-delà de la vision héroïque, l’échec laisse une trace plus ou moins indélébile chez les individus, vivant d’autant plus mal leurs difficultés entrepreneuriales qu’ils se sentent également « incompris », « mal aimés », par une société qui réduit souvent le monde patronal aux très grandes entreprises ou à l’objet de tous les fantasmes que représente le phénomène « start-up ». Si la situation est grave, parfois dramatique pour les plus fragiles, elle n’est pas désespérée…
La mise en place de dispositifs d’accompagnement, un processus indispensable !
C’est pourquoi il est fondamental de veiller à ce que des dispositifs solidaires, centrés sur le soutien psychologique, soient mis en place pour rompre l’isolement des chefs d’entreprise marqués par un échec, atténuer leur détresse psychologique et créer des conditions favorables à une prise en charge mentale et à terme, parvenir au fameux « rebond », dans une logique de renaissance personnelle et professionnelle.
Dans ce contexte, acteur essentiel de la prévention des difficultés des entreprises, il est apparu primordial à la BECI d’étendre ses missions pour accompagner le chef d’entreprise au-delà des aspects purement techniques, comptables et financiers. En faisant appel à des coachs bénévoles pour la détection de la détresse psychologique des dirigeants qu’elle suit, la Chambre de commerce peut ainsi être également présente sur les plans humain et psychologique. Si le chef d’entreprise accepte cette aide, il peut bénéficier d’un soutien actif et durable. Il s’agit donc très prochainement, le 17 novembre 2020 à 14h00 et en distanciel de prévenir, d’accompagner et de traiter des problèmes psychologiques et la souffrance morale aigüe des entrepreneurs faillis.
Dans un webinaire conjoint avec Magalie DEBERGH, avocate au Barreau de Bruxelles et spécialiste, entre autres, du droit de la faillite, j’aurai l’honneur d’évoquer la logique de la prise en charge et du soutien psychologique des femmes et des hommes en situation de grande vulnérabilité morale, mentale, émotionnelle et parfois même physique.
Formée aux sciences juridiques et humaines, je suis particulièrement investie dans l’accompagnement de carrière et à ce titre, je souhaite développer une approche emprunte de « sciences comportementales et cognitives » pour accompagner les entrepreneurs dans un moment difficile qu’est celui de la cessation d’activité.
Une prise en charge de la souffrance morale, un passage obligé !
La santé mentale et physique des entrepreneurs pourrait être déclarée d’utilité publique. Il faut répondre à la souffrance morale du failli. Créer des « sentinelles de prévention » pour sensibiliser, toujours et encore.
En effet, ne fonctionner qu’en mode « émotion » ne permet plus de raisonner.
Dès lors, être contacté aussi vite que possible par une personne qui écoute et encadre est d’un grand soulagement dans un premier temps. Il est difficile de trouver les mots pour qualifier le mieux-être que cela apporte, mais derrière tout cela, ce que la personne en détresse comprend avant tout, c’est qu’elle n’est plus seule… Or, sans cette aide quasi structurelle de programme tel que celui de reStart, bien souvent, les entrepreneurs ne feraient jamais la démarche de s’adresser à un aidant, alors qu’ils en ont tellement besoin… et ce, tout particulièrement dans cette période anxiogène de crise sanitaire du virus du Covid et a fortiori, de contexte économique de grand péril.
La gestion de l’intelligence adaptative de l’entrepreneur, un gage de renouveau !
En favorisant une meilleure connaissance du ressenti et des motivations humaines l’intelligence adaptative est un excellent « outil » d’accompagnement des entrepreneurs faillis.
Or, notons que très souvent encore, la gestion d’entreprise, quelles soient petites, moyennes ou grandes, est encore très largement imprégnée de pratiques provenant de notre culture cartésienne dans laquelle les émotions, par exemple, ne sont pas ou peu prises en compte, voire sont mal perçues lorsqu’elles sont exprimées sur le lieu de travail.
Vous l’aurez compris à la lecture de ces quelques éléments forcément très synthétiques, intelligence adaptative et entreprenariat vont de pair, cela ne fait plus de doute. L’influence des émotions sur les processus cognitifs et sur les comportements ne s’arrête pas à la porte d’entrée des entreprises.
L’humain est au cœur du monde entrepreneurial et au centre de l’économie dans toute son ampleur. L’apport des neurosciences en matière de management ouvre alors de nouvelles voies pour le développement des compétences émotionnelles des entrepreneurs en pleine reconstruction d’eux-mêmes et en qualité de « forces vives » du monde professionnel.
À propos de l’auteure
Clarisse MARTIN KERNEIS
Accompagnement de carrière et coach solidaire dans le programme reStart
L’entrepreneuriat : une manière de se relancer ! Rendez-vous le 10 mars
Frédéric Pons, s’est lancé dans l’entrepreneuriat en 2017 après une vingtaine d’années passées dans des fonctions marketing, commerciales et internationales. En plus, il donne également des cours sur l’innovation, la stratégie et le marketing dans plusieurs Business Schools internationales.
Lors de son webinar, vous aurez l’occasion de découvrir :