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De toutes les applications qui façonnent les smart cities de demain, l’éclairage intelligent est l’une des plus matures. Les réverbères d’autrefois se transforment en booster de la digitalisation urbaine.Et les entreprises sont aussi invitées à embrasser le smart lighting.
Des rues qui s’allument seulement en la présence de véhicules ou de personnes. Des réverbères dont l’intensité lumineuse change en fonction du trafic, du moment de la nuit ou de la météo. Voici quelques-unes des applications rendues possibles par l’éclairage intelligent. Cette technologie, qui permet de programmer et de gérer à distance un éclairage en fonction de plusieurs critères, connaît un vrai boom depuis quelques années.
Pas qu’une question de goût
Le premier intérêt du smart lighting, c’est bien sûr les économies d’énergie. Couplés à la technologie LED, les luminaires équipés de divers fonctionnalités et reliés à une plateforme logicielle offrent un gain de 65 à 70 % par rapport à l’éclairage traditionnel.
Second avantage, l’optimisation des opérations. L’éclairage intelligent donne en effet la possibilité de surveiller et faire fonctionner les luminaires à distance via la plateforme logicielle. Chaque point lumineux est individuellement connecté. La détection proactive et en temps réel des défaillances ou des comportements anormaux permet dès lors d’envoyer les techniciens de maintenance uniquement quand et où ils sont nécessaires.
À ceci s’ajoutent les améliorations de sécurité automobile et piétonnière apportées par un éclairage optimal, ainsi que celui du confort visuel. Les derniers systèmes permettent en effet un réglage fin de la luminosité en fonction de la dangerosité du moment ou bien l’adaptation du type de lumière.
On peut, par exemple, décider d’installer de lumières plus froides au petit matin et plus chaudes en soirée.
Autre argument de poids, la diminution de la pollution lumineuse des villes qui favorise le sommeil des riverains ou l’exploitation de lieux requérant l’obscurité, comme les observatoires.
Enfin, l’éclairage intelligent peut contribuer à la préservation des écosystèmes naturels. Par exemple, des éclairages différenciés peuvent être activés à proximité des lieux d’habitat de chauves-souris, très sensibles aux conditions lumineuses.
Croissance
La société liégeoise Schréder est à la pointe de ce secteur. Active un peu partout dans le monde, c’est elle qui, en partenariat avec Equans (Engie Services), s’est chargée l’hiver passé pour Sibelga d’un projet pilote très avancé au Bois de la Cambre (voir encadré). « Il y a dix ans, l’éclairage intelligent balbutiait encore », explique son Chief Innovation Officer Nicolas Keutgen. « Puis, le LED a fait passer l’éclairage de l’ère de l’électromécanique à celle de l’électronique, qui permet la commande à distance. La convergence avec les développements télécom et la transmission de data a ensuite permis de booster les applications ».
Grâce aux effets d’échelle d’un marché mondial qui double chaque année, le smart lighting se démocratise et son avenir est prometteur. «De par le monde, on a aujourd’hui 350 millions de points lumineux intelligents », explique Nicolas Keutgen, « soit à peine 5 à 6 % de l’éclairage mondial. Le LED, lui, équipe déjà 20 à 30 % de l’éclairage de par le monde. Or les deux technologies progressent aujourd’hui main dans la main.» Si la hausse des prix de l’énergie s’installe durablement, l’expert s’attend à une nouvelle accélération des appels d’offre.
Piliers de la smart city
Si les systèmes de smart lighting se nourrissent en partie de données issues d’autres systèmes (prévisions météorologiques ou de trafic), ils peuvent aussi alimenter ceux-ci. Pour les villes qui disposent d’une vraie stratégie à long terme en la matière, les réverbères d’autrefois transformés en luminaires modernes deviennent alors les piliers d’un dispositif smart-city.
« Le return immédiat de l’investissement, c’est la diminution des coûts d’électricité. Mais ce n’est que la première étape. On peut transformer les poteaux d’éclairage en véritables centres de captation des données qui contribueront à la digitalisation de toutes les infrastructures et services publics », confirme Nicolas Keutgen.
De fait, avec leur maillage serré de poteaux de 6 à 8 mètres, les systèmes d’éclairage urbain pourront demain servir de réseau de collecte et de diffusion des données de toutes sortes. On pense aux data de flux automobiles et piétonniers, de pollution de l’air, de conditions météo ou de présence de déchets. « Au-delà de la mobilité et de la sécurité, les réseaux de luminaires ont la capacité de contribuer véritablement à la résilience de villes exposées à des catastrophes naturelles. Par exemple, en se substituant au réseau télécom si celui-ci est endommagé », explique encore Nicolas Keutgen.
D’où l’importance pour les villes de faire reposer l’éclairage intelligent sur un réseau ouvert, interopérable et cybersécurisé qui ouvrira le champ d’autres possibles. « Pour les donneurs d’ordre, cette interopérabilité correspond aussi à une volonté de ne pas dépendre que d’un seul fournisseur. Ce fut d’ailleurs le cas pour Sibelga, avec laquelle nous avons travaillé cette année », conclut-il.
À propos de l’auteur
Nicolas Keutgen, Chief Innovation Officer chez Schréder