Pourquoi, à Bruxelles, un ministre peut-il décider unilatéralement de prélever des montants consacrés à la mobilité pour les affecter à l’acquisition d’un bâtiment pour le Samusocial ? Un budget a été voté, mais son utilisation semble relever du pouvoir discrétionnaire d’un ministre, hors du cadre fixé par le Parlement. Comment éviter de tels abus ?
Les règles existent pourtant ! En matière de contrôle des comptes, notamment. Ainsi, à Bruxelles, les organismes publics que l’on appelle des organismes administratifs autonomes (OAA) doivent présenter leurs comptes au Parlement et font l’objet d’un projet d’ordonnance qui doit être voté par ce même Parlement, conformément à la législation[1].
Or, voilà dix ans que le Parlement bruxellois est de facto exclu de ce contrôle, comme le constate la Cour des Comptes, chargée de certifier la régularité, la sincérité et la fidélité du compte général de l’entité régionale et des comptes généraux des OAA. En effet, dans son dernier rapport[2], la Cour des Comptes constate : « Au 30 septembre 2018, le Parlement n’a encore voté, ni donc approuvé, aucun compte d’organisme administratif autonome depuis l’exercice 2008 » ; avant de poursuivre : « Il n’a pas non plus voté les comptes 2014 à 2016 des services du gouvernement, les comptes consolidés 2014 à 2016 de l’entité régionale ni les comptes 2008 à 2016 de la Commission communautaire commune. »
Bref, comme Beci le rappelle dans son Mémorandum « Financer ses ambitions », mesure 24, voilà près de dix ans que le Parlement n’a plus la possibilité d’exercer le contrôle de ces comptes. Pour Beci, le prochain gouvernement, et avec lui, chacun des ministres et des secrétaires d’Etat qui le composeront, doivent s’engager à respecter cette obligation : soumettre les comptes des OAA au Parlement.
Comme le rappelle la Cour des Comptes, « le vote des comptes par l’autorité budgétaire (le Parlement) est nécessaire pour mettre un terme au cycle budgétaire et comptable ainsi que pour régulariser les éventuels dépassements des crédits de dépenses des budgets. En outre, la publication de ces ordonnances permet d’assurer la publicité des comptes. »
Pour rappel, et sans rentrer dans le détail, sur 21 comptes (2017) d’organismes bruxellois, seuls 6 ont été approuvés sans réserve ; ceux d’Actiris, du Fonds bruxellois de garantie, du Conseil économique et social de la Région de Bruxelles-Capitale, du Fonds régional bruxellois de refinancement des trésoreries communales, de Bruxelles Environnement et du Fonds pour le financement de la politique de l’eau. Pour l’avenir, les finances publiques bruxelloises méritent davantage d’ambition : 21 comptes approuvés sans réserve et présentés, dans les temps, au parlement.
[1] Loi du 16 mai 2003 fixant les dispositions générales applicables au budget, au contrôle des subventions et à la comptabilité des communautés et des régions ainsi qu’à l’organisation du contrôle de la Cour des comptes ; Ordonnance organique du 23 février 2006 portant les dispositions applicables au budget, à la comptabilité et au contrôle (OOBCC).
[2] 23e cahier de la Cour des Comptes adressé au Parlement de la Région de Bruxelles‐Capitale et à l’Assemblée réunie de la Commission communautaire commune.