Bruxelles: La foire aux taxes sur les bureaux

February 20, 2023 by
BECI Community

Précompte immobilier, taxes communales sur les surfaces et les immeubles de bureaux, taxes régionales sur les
surfaces non affectées à la résidence, et même dans certaines communes des taxes sur les parkings.
La fiscalité est particulièrement lourde sur les immeubles de bureaux situés à Bruxelles alors que la périphérie
se montre de plus en plus attrayante…

« Par le fait de son mille-feuille institutionnel, la Belgique se distingue comme le pays des empilements de taxes. À cet égard, les immeubles de bureaux n’échappent pas à la règle. Que du contraire, ils constituent une cible particulièrement privilégiée en matière de fiscalité locale et régionale », souligne Alexandra Dryjski, senior manager du département Finance Performance au sein d’Ayming Benelux. « Ce constat se vérifie d’autant plus à Bruxelles où plusieurs communes taxent même leurs emplacements de parking. Et cela, à des tarifs très variables ».


Étude sur la fiscalité immobilière à Bruxelles

Ayming est un groupe de conseil international qui emploie 1.300 personnes dans 15 pays (chiffre d’affaires de 141 millions d’euros en 2020). Il a pour vocation d’améliorer la performance des entreprises dans les Ressources humaines, l’Innovation et la Finance au travers d’une expertise dans l’optimisation de la Fiscalité immobilière.

« La taxe régionale bruxelloise sur les bureaux correspond, en moyenne, à 28 % du montant du précompte immobilier ».

Depuis 2019, il sort une étude relative à la fiscalité immobilière en Belgique. Et tout particulièrement sur la fiscalité appliquée aux immeubles de bureaux dans les 581 communes belges. Le verdict est sans appel. Bruxelles, dans sa globalité, applique des taux bien plus élevés que les autres régions du pays. Pire encore, sa périphérie se montre fiscalement bien plus attrayante que n’importe quelle autre partie du pays.

« La question des taxes, combinée à d’autres problématiques telles que la mobilité, fait progressivement fuir les entreprises de Bruxelles. » Alexandra Dryjski, Ayming Benelux

 

Précompte immobilier à Bruxelles

Globalement, sur l’ensemble du territoire, c’est en Flandre que le précompte immobilier sur les immeubles de bureaux est le moins élevé, avec une moyenne à 46,34 %. Même si c’est en Flandre occidentale qu’on trouve les quatre plus hautes taxations nationales, avec le pic enregistré à Alveringem (67,62 %). À Bruxelles, il est de 52,11 % : Auderghem (38,49 %) et Jette (62,24 %) occupent les extrêmes. En Wallonie, cette moyenne monte à 55,11 %. Ici, c’est Lasne (33,13 %) et Ath (64,94 %) qui ouvrent et ferment la marche.

 

Jette, Schaerbeek et Evere

En ne considérant que le précompte immobilier 2022 (sur base 100) du revenu cadastral indexé par commune, Ayming situe la Région de Bruxelles-Capitale légèrement au-dessus de la moyenne nationale. Trois communes bruxelloises apparaissent cependant dans le Top 30 national des communes à plus haute intensité fiscale. Il s’agit de Jette suivie de Schaerbeek puis Evere (qui sont toutes trois au-dessus des 60 %).

Si ce n’était que cela. Malheureusement, Bruxelles souffre d’un amoncellement d’autres taxes frappant les immeubles de bureaux. À ce précompte immobilier, il faut ajouter une taxe régionale, une taxe communale toujours pour ces mêmes bureaux et même parfois pour les emplacements de parking dont ils disposent.

 

Taxe bruxelloise à 28 % du PRI

Ainsi, outre le précompte immobilier sur ses bureaux, le redevable bruxellois doit s’acquitter d’une taxe régionale sur les surfaces non affectées à la résidence (TRB) qui correspond, selon les calculs d’Ayming, en moyenne à 28 % du montant du précompte immobilier. « En décortiquant le mode de calcul de cette taxe, il apparaît que la Région de Bruxelles-Capitale récupère en plus 14 % du RC indexé sur les surfaces de bureaux », précise Alexandra Dryjski. De ce fait, 17 communes sur 19 passent à plus de 60 % de pression fiscale. Et Jette, déjà leader à Bruxelles, s’arroge le titre de champion de Belgique avec plus de 79,66 % de pression fiscale. Loin devant Alveringem. Mais cela ne s’arrête pas là…

 

Taxes communales, sauf à Koekelberg

En Région bruxelloise, à cette TRB, il faut encore ajouter une taxe communale sur les surfaces de bureaux. Et cela, dans 18 communes sur 19 car Koekelberg est seule à ne pas instaurer cette taxe. Pour les autres communes, cette taxe est calculée par m² de surface de bureaux.

« Koekelberg est la seule commune bruxelloise à ne pas appliquer de taxe communale sur les surfaces de bureaux ».

Et l’on n’y va pas avec le dos de la cuillère puisque les communes les ‘moins gourmandes’ sont Auderghem et Woluwe-Saint-Pierre qui ‘se contentent’ d’une taxe d’un peu plus de 9 € du m² de bureaux, alors que le plus glouton est de loin Ganshoren avec une taxe communale sur les bureaux de 32 € du m². Lorsqu’on sait que l’avenue de l’Hôpital français est du côté pair sur Ganshoren, et du côté impair sur Koekelberg, l’on peut imaginer que l’un pleure et l’autre rit selon son côté du trottoir. À signaler que l’échevin des Finances est socialiste sur Koekelberg alors qu’il est libéral à Ganshoren.

 

Bruxelles-Ville a doublé sa taxe des bureaux

Selon Ayming, lors de la publication de son étude, la taxe communale sur les surfaces de bureaux s’élevait en moyenne
à 16,04 euros du m² en Région bruxelloise.

Mais c’était compter sans de récentes augmentations au sein de quelques communes. « La plus significative est celle de Bruxelles-Ville dont la taxation sur les surfaces de bureaux vient de passer de 9,82 euros du m² à un peu plus de 17 euros du m² », souligne Alexandra Dryjski. Cette taxe communale sur les surfaces de bureaux n’existe pas, ou presque pas, dans les autres villes de Belgique. Ou alors, elle est bien moins élevée.

Ainsi, elle se chiffre à 0,22 €/m² à Gand, varie entre 0,10 et 0,50 €/m² à Anvers ou est de 0,25 €/m² à partir de 2.000 m² à Bruges. On n’en trouve pas trace à Charleroi, Liège, Namur ou de nombreuses autres villes wallonnes. Elle est cependant de 8€/m² à Ottignies (LLN) et de 8,60 €/m² à Waterloo.

 

Taxe sur les parkings

Près de la moitié des communes bruxelloises (9 sur19) appliquent une taxe sur les emplacements de parking. Il s’agit, par ordre décroissant de taxation, de Woluwe-Saint-Lambert (370 € par emplacement), Saint-Josse-ten-Noode (163 €) Molenbeek-Saint-Jean (161,54 €), Saint-Gilles (150 €), Schaerbeek (142,04 €) Berchem-Sainte-Agathe (103,02 €), Bruxelles-Ville (62 €), Auderghem et Woluwe-Saint-Pierre (30 €/emplacement) et enfin Ixelles qui applique un tarif particulier de 26 € par m².

Les communes n’ayant pas encore taxé les parkings de bureaux sont Anderlecht, Etterbeek, Evere, Forest, Ganshoren, Jette, Koekelberg, Uccle et Watermael-Boitsfort.

En synthèse, Ayming donne une note maximale (5 sur 5) à neuf communes bruxelloises en termes de degré de pression
sur la fiscalité immobilière. Seules Auderghem, Koekelberg et Watermael-Boitsfort obtiennent une note de 3/5 alors qu’avec 4/5, on trouve Anderlecht, Etterbeek, Forest, Ganshoren, Saint-Josse, Uccle et Woluwe-Saint-Pierre.
L’étude d’Ayming est téléchargeable gratuitement sur le Net.

Le suicide bruxellois

Des problèmes de mobilité, de stationnement, des dédales administratifs dans la délivrance des permis d’urbanisme, des taxes plus élevées…

Quel est encore l’intérêt de rester, s’établir ou construire des immeubles de bureaux en Région bruxelloise ? « On y trouve les institutions européennes et cela donne du prestige d’avoir ses bureaux à Bruxelles », concède Alexandra Dryjski. « Mais
la périphérie devient de plus en plus tendance. Ce n’est pas innocent si les Big Four ne sont plus à Bruxelles et si de nombreuses multinationales et banques ont déménagé leur siège pour la périphérie. La question des taxes, combinée à d’autres problématiques telles que la mobilité en auront fait fuir plus d’un. »

La responsable du département Finance Performance d’Ayming constate que ce sont généralement les communes bruxelloises comptant le plus de m² de bureaux qui taxent le plus. « C’est le cas pour Schaerbeek, Saint-Josse-ten-Noode et la Ville de Bruxelles pour le quartier Nord. Etterbeek avec le quartier européen, même si les bâtiments institutionnels sont immunisés de taxes tant qu’ils sont occupés par des instances européennes, Evere et ses centres de bureaux autour de Colonel Bourg et Léopold III. Avec le paradoxe que les entités de la Région bruxelloise, minées par la crise du Covid, affichent un âpre déficit et que, pour pallier cela, elles usent de leviers fiscaux tels que la hausse de l’IPP et/ ou du précompte immobilier afin de ne pas présenter un budget en déficit. »

Mais la poule aux œufs d’or risque de pondre moins. « En de nombreux endroits à Bruxelles, des immeubles de bureaux sont reconvertis en logements, moyen efficace pour transformer le surplus de m² de bureaux obsolètes en m² de logements convoités. Mais beaucoup ignorent que la transformation de l’immeuble doit être complètement accomplie pour qu’il perde son affectation initiale de bureaux et, bien sûr, les taxes qui l’accompagnent. La situation est bien différente en cas de démolition et de nouvelle construction puisque les taxes disparaissent au moment où l’immeuble est totalement démoli avant de réapparaître à la première occupation de celui-ci. Dénoncer et corriger cette aberration est d’ailleurs un combat que l’on mène depuis des années avec les différentes administrations bruxelloises. »

 

Choisir c’est renoncer mais il faut être clair.

Bruxelles a l’incroyable chance d’être la capitale de l’Europe. Il serait temps que nos dirigeants politiques fassent un choix : continuer à chasser les bureaux vers la périphérie et appauvrir notre capitale ou renforcer Bruxelles comme ville économiquement compétitive. Certes, l’IPP rapporte plus que le précompte immobilier sur les bureaux, mais n’est-ce pas un mauvais calcul à long terme ?

 

Les attraits des Brabant wallon et flamand

En Flandre et en Wallonie, pas de taxe régionale sur l’immobilier de bureaux. Et des taxations locales moins fortes sur les immeubles de bureaux. L’exode vers la périphérie ne risque-t-il pas de s’amplifier ?

« Dans les communes bordant la Région de Bruxelles-Capitale, les précomptes immobiliers sont moins élevés en valeur relative. Dès lors, leur attractivité n’est pas étonnante, et l’offre de surfaces de bureaux continue à s’étoffer », confirme la responsable d’Ayming dont les bureaux se trouvent à Diegem.

Le Brabant flamand est d’ailleurs plus attractif que le Brabant wallon, qui ne présente que quatre communes (Lasne, Wavre,
Beauvechain et Waterloo) dans le Top 20 brabançon des communes fixant le plus petit précompte immobilier.

Dans ce classement, c’est Zaventem qui se montre la plus attrayante avec un précompte immobilier en dessous des 30 %, pas de taxe communale sur les surfaces de bureaux et encore moins sur le parking.

 

À propos de l’auteur

Julien Semninckx, journalist

 

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