L’emploi à Bruxelles : pas de quoi s’inquiéter

July 10, 2018 by
BECI Community

HIVA-KULeuven vient de publier une étude sur l’évolution de l’emploi à Bruxelles. Elle suscite des critiques de la part de Didier Gosuin, ministre bruxellois de l’Économie et de l’Emploi. Selon lui, cette étude suggère que la création d’emplois ne progresse pas dans la région. Les contacts pris des deux côtés sont toutefois rassurants : l’emploi se porte bien.

Dynam-Reg constitue un protocole de collaboration entre l’ONSS, HIVA-KULeuven et trois institutions régionales. L’objectif consiste à déterminer annuellement combien d’emplois ont été créés dans les régions et combien ont disparu. Selon la dernière étude en date, le taux brut de création d’emplois à Bruxelles est comparable à celui des autres régions, à savoir 56 nouveaux emplois pour 1000 emplois existants (58 en Wallonie et 57 en Flandre). Ces résultats donnent l’impression que Bruxelles ne fait guère mieux que les deux autres régions, ce qui a eu le don d’agacer Didier Gosuin, ministre bruxellois de l’Économie et de l’Emploi. Il déplore que les chiffres avancés par Dynam soient incomplets. « L’étude HIVA tient exclusivement compte des salariés, alors qu’il y a à Bruxelles de très nombreux indépendants et des milliers de travailleurs avec un statut étranger. On ne peut pas écarter ces deux catégories quand on dresse le bilan de l’emploi dans notre ville », réfute le ministre.

Le Pr. Ludo Struyven, de l’HIVA, se justifie : « Nous n’examinons pas la dynamique des entreprises, mais celle de l’emploi. Nos statistiques reprennent uniquement les indépendants qui, durant la période analysée, ont engagé un premier salarié. Nous n’avons pas intégré les emplois en détachement, alors qu’à Bruxelles, ils sont nombreux, notamment dans le secteur du bâtiment. Si nous avions intégré l’emploi international, le taux d’emploi aurait augmenté de 4 %. Nous avons mis en évidence l’importance de cet aspect dans une autre étude, réalisée du concert avec l’IBSA. Toutefois, l’emploi auprès d’institutions internationales telles que l’Union européenne et l’OTAN est particulièrement stable dans la durée. Il n’a donc pas d’impact sur la dynamique de l’emploi. »

Bruxelles, un laboratoire

©Beci/Reporters

Le ministre Gosuin constate que la Labour Force Survey du SPF Économie (une enquête trimestrielle sur les travailleurs) renvoie une tout autre image que les résultats Dynam. Cette enquête conclut que le nombre d’emplois a connu sa plus forte augmentation dans la Région bruxelloise entre 2016 et 2017 (1,4 %, comparé à 0,9 % en Région flamande et 0,3 % en Région wallonne). Autres commentaires du ministre sur les données d’HIVA-KULeuven : « Elles concernent le mois de juin 2016, juste après les attentats, le lock down et les réparations de tunnels. Il va de soi que ces événements ont eu un impact important sur le développement économique et donc sur la création d’emplois à Bruxelles. »

Pour sa part, le Professeur Struyven met en exergue le phénomène des déplacements internes de personnel. « Il s’agit d’entreprises également actives dans une autre région. C’est notamment le cas de grandes institutions financières. Les nouveaux collaborateurs bénéficient par exemple d’une formation au siège à Bruxelles pendant leur première année, avant d’aller travailler dans une filiale en province. Et puis, il y a les petites entreprises bruxelloises qui voudraient se développer, mais qui, par manque d’espace ou en raison de prix excessifs à Bruxelles, vont migrer une partie de leurs activités vers des implantations à l’extérieur de la ville. »

« Nous devons appréhender Bruxelles comme un laboratoire de l’économie de demain », pose le ministre Gosuin. Il ne s’inquiète pas du départ de certaines entreprises en expansion. « Du moment que nous assurons la dynamique entrepreneuriale de notre région. À la fin 2017, nous comptabilisions 104.705 entreprises, contre 101.131 en 2016. Cela représente 4.230 nouvelles unités. Tant que nous accueillons chaque jour des dizaines de start-up, il n’y a aucune raison de s’inquiéter. »

Toujours plus d’emplois

Le Pr. Ludo Struyven craint qu’une focalisation sur l’évolution nette, telle qu’elle figure dans l’étude Dynam, puisse créer un malentendu. Dynam utilise cette évolution nette pour mettre en évidence les mouvements sous-jacents, qui n’apparaissent dans aucune autre statistique. Par ailleurs, Dynam adopte le point de vue de l’employeur – et donc du lieu de travail – et ne prend pas en compte le domicile, comme le font d’autres statistiques. « La disparition d’emplois n’est pas grave en soi, tant que d’autres sont créés en suffisance, ce qui est bel et bien le cas », constate le professeur. Didier Gosuin souligne pour sa part le message positif qui émerge des chiffres du dernier recensement des travailleurs : « Nous avons créé 10.000 nouveaux emplois en Région bruxelloise entre 2016 et 2017, ce qui nous porte à un total de 726.350 jobs. Les Bruxellois sont les premiers à en bénéficier. Le nombre de Flamands et Wallons qui viennent travailler à Bruxelles est d’ailleurs en recul. Nous constatons en outre que des Bruxellois partent à la conquête du marché du travail en Flandre et en Wallonie. Plus de 50.000 Bruxellois travaillent en Flandre. En 2017, près de 77.000 habitants de Bruxelles ont trouvé un emploi en dehors de notre région, soit 10.000 de plus qu’en 2012. »

Le professeur Struyven arrive lui aussi à la conclusion que Bruxelles remplit avec brio son rôle de moteur économique – ce que plusieurs études confirment.  « Nous avons notamment examiné les start-up technologiques. Même à l’échelon international, Bruxelles constitue une région essentielle dans ce domaine. Nous savons aussi que de toutes les régions de Belgique, Bruxelles se distingue par la plus forte évolution de la population active depuis 2000. Le taux d’emploi y évolue plus favorablement depuis 2013 qu’en Flandre et en Wallonie. La croissance du nombre d’indépendants y est également plus marquée. Nous autres chercheurs donnons donc raison au ministre Gosuin : trop souvent, l’emploi à Bruxelles est présenté injustement de manière négative. »

BECI Community July 10, 2018
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