Insomnies, irritabilité, stress, douleurs… Voici autant de signes avant-coureurs d’un burn-out qui doivent vous alerter. Car en tant que travailleur, vous avez, vous aussi, une responsabilité dans la prévention et la gestion du burn-out. Comment pouvez-vous agir à votre niveau ? Deux coaches spécialisées en burn-out se penchent sur la question.
Le burn-out touche chaque année de plus en plus de travailleurs. D’après Securex, l’incapacité de travail liée au burn-out aurait coûté près de 8 milliards d’euros en 2017. Dans une société où tout change en permanence, où le rythme de vie – tant professionnel que privé – est effréné et où les sollicitations sont incessantes, de plus en plus de travailleurs craquent. Tant les autorités publiques que les entreprises en sont conscientes et des mesures sont mises en place pour lutter contre le syndrome du burn-out, actuellement toujours pas reconnu comme maladie professionnelle. À côté de cela, tout un chacun, en tant que travailleur, peut aussi agir individuellement, à son propre niveau.
Les signes qui ne trompent pas
Plusieurs symptômes doivent alarmer le travailleur. Il y a tout d’abord les symptômes physiques, tels que la fatigue, les douleurs, un sommeil troublé, des difficultés digestives, etc. Ils s’associent généralement à des symptômes émotionnels comme l’irritabilité, l’impatience ou l’énervement. Viennent ensuite les symptômes cognitifs liés à l’épuisement (pertes de mémoire, difficultés à se concentrer…) et enfin les symptômes mentaux, notamment la dépréciation de soi ou les pensées négatives.
« Bien sûr, nous sommes tous occasionnellement stressés, fatigués ou irrités », commente Stéphanie van de Perre, coache et formatrice chez Growing Attitude. « Ce qui doit alerter le travailleur, c’est quand cela devient récurrent ou permanent et qu’il n’arrive plus à récupérer, même après un week-end ou une semaine de congé. »
La difficulté est que la personne qui est dans un processus de burn-out, mais n’a pas encore atteint son point de rupture, est dans une forme de déni. « Le travailleur n’est plus connecté avec ses sensations physiques ni avec ses émotions. S’il a mal au dos, il va prendre un cachet sans chercher à savoir ce qui se cache derrière cette douleur. » En effet, il est reconnu que les travailleurs en burn-out n’arrivent généralement pas à accepter qu’ils vont mal. « L’entourage a donc un rôle très important à jouer dans la prise de conscience de la situation. C’est souvent eux qui doivent tirer la sonnette d’alarme », assure Moira Wrathall, coache et formatrice chez The Coaching Hub.
Rester connecté à ses émotions
« Le processus de burn-out est long et insidieux. Ça ne s’installe pas du jour au lendemain. En prévention, la première chose à faire est donc de prendre soin de soi », poursuit-elle. En effet, l’homme n’est pas une machine qui peut fonctionner sans jamais se reposer. Et le meilleur moyen d’éviter un burn-out est d’avoir une vie saine et équilibrée. « Chacun devrait prendre le temps d’identifier ce qui lui pompe de l’énergie et ce qui lui en apporte, puis veiller à ce que les deux s’équilibrent », conseille-t-elle. Quand on parvient à obtenir cet équilibre, il est plus aisé de passer à travers des périodes de stress intense ou de faire face à des charges de travail ponctuellement plus élevées. Pour la coache, l’individu doit rester au centre de son écosystème, faire le point régulièrement afin de voir si des choses doivent être réorganisées et être à l’écoute de son corps. « Mais c’est plus facile à dire qu’à faire quand on est dans un mode de fonctionnement lié à l’action et aux résultats. Nous sommes peu éduqués à nous connecter aux émotions et au ressenti », ajoute Stéphanie.
Se tourner vers un professionnel
Dès les premiers signes de burn-out, le mieux est de faire appel à un professionnel. Médecin traitant, médecin du travail, coach interne, personne de confiance, responsable hiérarchique… Toute une série de gens peuvent aider le travailleur. Au final, le diagnostic du burn-out sera toujours posé par un médecin. « Les mentalités évoluent et nous pouvons nous en réjouir », commente Stéphanie. « Le burn-out est vraiment reconnu aujourd’hui dans les entreprises. Le tabou se lève petit à petit. On sait que les personnes en burn-out sont des personnes engagées et motivées. Que ce sont des employés qui se sont donnés à 300 % et se sont épuisés au travail. Il est dès lors aujourd’hui plus facile d’en parler à sa hiérarchie ou aux ressources humaines. Et c’est aussi important de pouvoir être honnête sur la cause de son absence afin que le retour au travail se passe bien. »
Time management et gestion du stress
En pratique, de nombreuses actions concrètes peuvent être mises en place par le travailleur pour éviter l’épuisement professionnel. Pour les deux spécialistes, la question du time management est primordiale. Il faut se demander comment on gère son temps au travail, mais aussi de façon globale. Il n’appartient qu’au travailleur de décider de ne plus lire ses mails en dehors des heures de travail (ce fameux droit à la déconnexion), de poser ses limites, d’oser dire à son supérieur qu’on ne peut pas prendre ce dossier en plus. Nous sommes tous responsables de notre propre niveau de stress. « Si le travailleur n’y arrive pas seul, il peut consulter un coach ou un psychologue pour analyser son mode de fonctionnement et apprendre à faire les choses différemment », avance Stéphanie. Le sport et la méditation sont aussi de bons outils pour gérer son stress.
Un retour au travail réfléchi
Si malheureusement le point de rupture est atteint, la première étape vers la guérison sera le repos physique. Puis, le travailleur devra faire un travail sur lui-même pour pouvoir remettre le pied à l’étrier de façon durable. Et Stéphanie de développer : « Il faut s’interroger sur son mode de fonctionnement, savoir ce qui nous pousse, derrière quoi on court, etc. Qu’est-ce qui est important pour moi ? Quelles sont mes vraies valeurs ? »
Avant la reprise, il faut préparer soigneusement son retour au travail. Veut-on retourner dans son ancienne fonction ? Est-elle encore disponible ? Il arrive aussi que la réflexion et le cheminement accompli poussent le travailleur à vouloir changer de voie, à se réorienter vers un autre service ou même une autre entreprise. « Il faut tenir compte de ce dont on a envie, mais aussi de ce dont on est capable », précise Moira. Le mi-temps médical est souvent une bonne solution pour éviter une reprise brutale et limiter le risque de rechute. Pendant une période de transition, on peut négocier avec sa hiérarchie afin d’avoir une fonction « sur mesure » et revenir dans de bonnes conditions et de manière durable.
De retour au bureau, le piège est bien sûr de retomber dans ses anciens travers. Dans ce cadre, le travail réalisé avec le psychologue ou le coach doit servir de barrière de sécurité. « Une fois que l’on connaît ses propres signaux d’alerte, il est plus facile d’y être attentif. On est reconnecté à ses émotions et il est beaucoup plus aisé de ne plus dépasser ses limites », assure Stéphanie. « Il est aussi important de continuer de se faire accompagner après la reprise du travail, de faire le point régulièrement et de pouvoir redresser la barre si nécessaire », conclut-elle.
Faites le test !
Dans le cadre de la prévention et de la gestion des burn-out, des nombreux outils voient le jour, notamment des tests en ligne pour évaluer son niveau de stress et de bien-être au travail. Citons, par exemple, le Preventing Burnout Test (PBT), lancé sur le marché par Bright Link.
Le PBT a pour but de mesurer le niveau d’épuisement professionnel ainsi que les causes (professionnelles et personnelles) qui en sont responsables au travers de 23 indicateurs. Cet outil a une double ambition : offrir un soutien préventif aux individus qui s’approchent malgré eux d’une situation de burnout et aider les dirigeants à mieux cibler leurs priorités en termes de politique de prévention.
En pratique, un questionnaire anonyme est envoyé aux employés. Leurs réponses sont centralisées et sécurisées. Chacun reçoit ensuite un rapport confidentiel identifiant son niveau de fatigue chronique, les zones de confort et à moyenne ou haute vigilance. Quant à l’employeur, il obtient une cartographie de risques collectifs lui permettant d’améliorer sa politique de prévention interne.